Non, les psychiatres libéraux ne font pas de la bobologie !

Hélène Baudoin
Retour au sommaire - BIPP n° 54 - Mars 2009

Les consultations se succèdent.

Une journée remplie : 10 heures quasiment sans discontinuer. Une écoute au plus près d'histoires de vie qu'il faut très attentivement décrypter les unes à la suite des autres avec la même vigilance.

Car il s'agit de maintenir toute cette population, active mais en souffrance, dans les rails d'une cohérence à vivre sa vie chaque jour.

Et l'on sent bien, dans l'intensité de ces récits, même à distance des épisodes aigus assez rapidement contenus, qu'il faut être capable de guetter les retours de la dépression, les menaces du délire, l'épuisement causé par l'insomnie jusqu'à ce que l'élaboration, lente et sillonnée de résistances, mène à un soulagement stable de la problématique.

J'ai été surprise de voir s'évanouir des colères, d'allure fortement teintée de paranoïa me faisant craindre une décompensation imminente, grâce à la patience de la mise en relation et à une écoute qui sait se situer en dehors de tout jugement, là où toute attitude rigide ou lointaine aurait pu mener à l'issue redoutée. On sent alors le maillon social indispensable que nous maintenons grâce à cette relation suivie, semaines après semaines, chez ces patients qui sont des parents, des professionnels.

Il y aurait des exemples sans nombre.

Cet adolescent solitaire et étrange dans ses premiers contacts qui se détend et livre sans crainte ses angoisses à être et son originalité après quelques consultations seulement, mais dont on ne sait pas s'il n'aurait pas déclenché une schizophrénie en l'absence de lieu où parler son intériorité.

Sans parler de toutes ces manifestations somatiques que le traitement efficace et durable de l'angoisse et de la dépression permet de prévenir.

Non ! les psychiatres libéraux ne sont pas des dinosaures dont la disparition serait dans l'ordre des choses

J'affirme qu'ils sont bien plutôt à l'avant-garde d'une société réellement en progrès, c'est-à-dire qui sait se donner les moyens de prévenir autant que de guérir !

Nous ne sommes pas responsables des régressions de la société.

Nous exerçons une profession vivante et dans la recherche permanente menée au plus près de la clinique et inscrite dans le long terme.

Hélène Baudoin
Nice

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