Informatisation des cabinets. Pas de précipitation
La date limite pour solliciter la subvention de 9 000 francs destinée à l’équipement informatique reste fixée au 31 décembre 1997. Indépendamment de la question politique - pour ou contre la télétransmission - il est donc temps de faire le point d’une situation qui reste encore bien confuse.
Principes :
L’octroi de la subvention suppose pour le médecin conventionné de signer un contrat avec sa Caisse Primaire, contrat aux termes duquel il s’engage à télétransmettre 50 % des feuilles de soins trois mois après la distribution dans sa région de la Carte Sésam-Vitale, puis 90 % après six mois. En contrepartie de cet engagement, le praticien percevra donc cette somme de 9 000 francs, composée en fait d’une subvention de 7 000 francs pour l’achat du matériel et d’une contribution de 2 000 francs, payée une fois pour toutes, pour les frais de télétransmission.
Indépendamment de ce contrat, la télétransmission demeure de toutes manières une obligation légale, instaurée par l’ordonnance du 24 avril 1996, à laquelle même les praticiens qui n’auraient pas contracté avec leur CPAM en vue de bénéficier de cette subvention devront se soumettre à terme, ceux d’entre eux qui refuseraient définitivement de s’y plier devant alors acquitter une taxe sur les feuilles de soins en papier. Hormis pour ceux d’entre nous qui envisagent d’arrêter très prochainement leur activité professionnelle, ou qui feraient le choix délibéré de poursuivre avec le système de feuilles de soins en papier, il y a donc tout intérêt à faire en sorte de bénéficier de cette subvention.
Mise en œuvre :
Il n’y a d’obligation que de télétransmission des feuilles de soins, et non pas d’informatisation du dossier médical. Le premier choix à faire pour chacun d’entre nous est donc avant tout de décider de s’équiper soit en vue de la seule télétransmission, soit de s’engager dans une démarche plus globale d’informatisation médicale.
Logiciel :
Cette option fondamentale va se traduire concrètement dans le choix du logiciel. Le praticien s’équipera soit d’un logiciel assurant essentiellement la fonction de télétransmission, soit d’un logiciel plus complet qui permettra de surcroît la gestion du dossier médical et, éventuellement, d’autres services (agenda, comptabilité, etc.).
Quel que soit le type de logiciel retenu, ce dernier doit avoir été agréé pour la télétransmission par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie pour pouvoir être utilisé. Le Centre National de Dépôt et d’Agrément de la CNAM a mis en place un serveur minitel (3614 CNDA) sur lequel se trouve la liste des logiciels ayant déjà reçu cet agrément.
Il doit être clair que la Caisse Nationale d’Assurance Maladie ne développe ni ne commercialise elle-même aucun logiciel : ils sont tous produits et distribués par des entreprises privées indépendantes des caisses.
Il ne nous appartient pas de donner un avis en faveur de tel ou tel logiciel. Il n’existe de toute manière pas encore de logiciel spécifiquement conçu pour le psychiatre privé libéral et tous les logiciels permettant la gestion du dossier médical sont organisés en fonction de la pratique du médecin généraliste. Ils présentent donc tous une abondance de possibilités, dont le psychiatre n’a généralement pas besoin, mais qui retentit sensiblement sur le prix de vente. C’est pourquoi, dans notre discipline sans doute davantage que dans d’autres, l’opportunité d’investir dans un logiciel assurant la gestion du dossier peut paraître très discutable.
Dans le cas où l’on déciderait cependant d’informatiser le dossier médical, il est impératif de veiller à ce que le logiciel retenu soit doté d’une fonction d’exportation des données sous un autre format que celui qu’il utilise, ceci afin de garder la possibilité de changer un jour de logiciel sans perdre ses données antérieures.
Il faut aussi se montrer particulièrement vigilant sur les possibilités d’évolution du logiciel en fonction de nouveaux besoins éventuels, et à quel prix. Cette question est particulièrement importante à l’heure où l’on parle de mettre en place le Réseau-Santé-Social, dont on sait encore fort peu de choses, mais qui suppose des possibilités d’échange d’informations entre praticiens via leurs ordinateurs, possibilités que les logiciels actuels ne prennent pas en compte puisque le protocole de transmission de ce réseau n’est pas encore défini.
Matériel :
Outre la Carte de Professionnel Santé qu’il faudra acquérir, le matériel minimum nécessaire à la télétransmission est le suivant : soit un terminal autonome dédié à la télétransmission, soit un ensemble informatique composé d’un micro-ordinateur (PC ou Macintosh), d’une imprimante, d’un modem et d’un terminal permettant de lire à la fois la Carte de Professionnel Santé et la Carte Sésam-Vitale. Pour ceux qui envisagent d’informatiser le dossier médical, il est prudent d’investir en outre dans un dispositif fiable de sauvegarde des données.
On sait encore peut de choses sur les terminaux autonomes qui permettraient de s’acquitter de l’obligation de télétransmission sans avoir à acquérir de micro-ordinateur. Il se peut que ce soit une option intéressante mais elle interdit évidemment toute évolution ultérieure vers d’autres services : il convient donc de rester circonspect si l’on s’oriente vers cette solution qui a cependant pour elle le fait qu’elle sera la moins onéreuse et pourra tenir dans l’enveloppe de la subvention.
En revanche, si l’on décide d’acquérir un ordinateur, le choix du type de logiciel peut influer dans une certaine mesure sur le choix de l’ordinateur, un logiciel ne prenant en charge que la fonction de télétransmission demandant évidemment beaucoup moins de ressources (mémoire vive, taille du disque dur, dispositif de sauvegarde) qu’un logiciel offrant de multiples possibilités. A moins que l’on ne possède déjà un micro-ordinateur, il vaut donc mieux attendre d’avoir choisi son logiciel avant d’acheter le matériel. A l’évidence, les 7 000 francs de la subvention dévolus au matériel ne suffiront pas à financer tout cet équipement dont le montant total s’établira entre 15 000 à 20 000 francs.
Signalons à ce sujet que le Centre National des Professions de Santé est en train d’élaborer une «Charte de la Qualité» des matériels informatiques dans les professions de santé. Bien que les matériels informatiques les plus courants soient généralement très fiables, il peut être intéressant d’attendre la publication de cette charte avant de s’équiper.
En matière d’achat de micro-ordinateur, l’erreur la plus commune reste de s’équiper d’un matériel surdimensionné au regard des besoins réels, dans l’espoir fallacieux de préserver son investissement. Il n’en est malheureusement rien car la vitesse d’obsolescence de ces produits reste vertigineuse et l’on risque de dépenser en fait plusieurs milliers de francs supplémentaires pour ne gagner que six mois sur le vieillissement de la machine. Toutes proportions gardées, un micro-ordinateur devrait plutôt se choisir comme une voiture : de même qu’on n’achète pas une puissante berline dans le seul but de la garder plus longtemps qu’une voiture moyenne mais qu’on la choisit bien en fonction de ses besoins, de son goût et de ses moyens, en restant conscient qu’il faudra la remplacer quelques années plus tard, l’on doit choisir un micro-ordinateur selon le besoin que l’on en a actuellement, en se souvenant qu’il devra probablement être remplacé quatre ou cinq ans plus tard pour pouvoir faire fonctionner les nouvelles versions des logiciels que l’on utilise couramment.
Maintenance :
Le praticien s’engage à assurer la continuité de la télétransmission. A côté du matériel et du logiciel, il faut donc également investir dans un contrat de maintenance permettant de garantir un dépannage sous 24 h en cas de besoin. Ce contrat sera le plus souvent proposé par le vendeur du matériel.
C’est cet aspect, trop souvent oublié, de l’informatisation qui peut s’avérer le plus onéreux à l’usage car le dépannage d’urgence sur site suppose évidemment pour le prestataire de ce service d’entretenir une infrastructure coûteuse en personnel qualifié et en matériel. De manière générale, en informatique, le coût des contrats de maintenance est de l’ordre de 12 % par an de l’investissement initial. Il se peut qu’il s’avère inférieur dans le cadre de l’informatisation des cabinets médicaux étant donnée l’importance de ce marché.
Au regard de ce coût, le médecin est donc en droit de se montrer particulièrement exigeant sur les termes du contrat, d’autant que c’est lui qui sera sanctionné en cas de manquement à la télétransmission et non le prestataire de ce marché.
Certaines entreprises peuvent exiger en contrepartie que le médecin suive une formation à l’utilisation du logiciel pour que le contrat de maintenance soit valable, ou bien qu’il s’équipe de dispositifs supplémentaires de sécurité (onduleur, système de sauvegarde des données) dont le coût vient encore alourdir l’investissement initial et auxquels il faut aussi penser au moment d’établir son budget.
Que faire en pratique ?
Au terme de ces quelques réflexions, nous vous proposons le modus operandi suivant :
Dès maintenant, en fonction de votre propre sensibilité à cette question, commencez à réfléchir à l’option d’informatisation que vous aller suivre : informatisation minimum aux seules fins de satisfaire à l’exigence de télétransmission ou bien informatisation plus globale du cabinet.
Aux alentours du 15 octobre, écrivez au Service Relations avec les Professions de Santé de votre Caisse Primaire afin de demander le contrat permettant de bénéficier de la subvention. Il est inutile d’écrire plus tôt : un certain nombre de documents d’information sont actuellement en cours de rédaction à la Caisse Nationale d’Assurance Maladie. A cette date ces documents auront été distribués et votre Caisse Primaire sera en mesure de vous les fournir.
Prenez ensuite le temps au cours du mois de novembre et le début du mois de décembre de sélectionner un logiciel qui corresponde à vos besoins, que vous optiez pour un logiciel de télétransmission simple ou pour un logiciel plus complet. L’agrément par la Caisse Nationale est à vérifier mais ne devrait en général pas poser problème. En revanche, restez vigilant, quel que soit le type de logiciel, sur les points suivants : possibilités d’évolution du logiciel vers les services du Réseau-Santé-Social (dont les caractéristiques sont encore inconnues à ce jour), possibilités d’exporter les données sous un autre format et qualité et contraintes de la maintenance. Étant donné que, pour une pratique de psychiatre libéral, tous les logiciels fourniront toujours plus de possibilités que nous n’en avons besoin, c’est surtout sur la qualité de la maintenance que nous vous conseillons de faire votre choix.
Terminez par le matériel dans le courant du mois de décembre. Que vous utilisiez un ordinateur que vous possédez déjà et que vous ferez évoluer si besoin, ou bien que vous en achetiez un, restez mesuré quant à la puissance de la machine et privilégiez plutôt la qualité des périphériques (écran, imprimante, modem, dispositif de sauvegarde) qui, dans un contexte professionnel, priment la puissance brute du micro-ordinateur. Là aussi, soyez vigilant sur la maintenance, tout particulièrement dans le cas où vous auriez à négocier un contrat pour un ordinateur que vous possédez déjà et pour lequel vous n’avez actuellement, dans le meilleur des cas, qu’une simple garantie.
Il ne vous restera plus qu’à remplir le dossier fourni par votre Caisse Primaire et à le renvoyez avant le 31 décembre puis à attendre le moment où la Carte Sésam-Vitale sera distribuée dans votre région.
Jean-Jacques LABOUTIÈRE
Dernière heure
La presse professionnelle (notamment Q.M. 22/9/97) vient de donner l’information selon laquelle la CNAM, contrairement à ce qui nous avait été donné à entendre, serait en mesure de diffuser les formulaires du contrat-type dans les CPAM pour le 1er octobre environ. Vous pouvez donc dès cette date vous adresser au service des Relations avec les Professions de Santé de votre CPAM pour l’obtenir.
Le reste des problèmes, tels que nous les avons exposés, demeure entier.
A suivre
J-J. L.