Uniformiser pour mieux gérer

Antoine Besse
Retour au sommaire - BIPP n° 28 - Janvier 2001

Notre discipline, la psychiatrie est jeune mais déjà bien malmenée par une volonté technocratique économique et comptable. Alors que dans le monde économique anglo-américain l'état providence a été éliminé de longue date, chez nous, la mondialisation risque d'entraîner cette même volonté de réduire le coût de la protection sociale (couverture maladie et autres dispositifs) - notamment les soins aux malades chroniques hospitalisés sur de longue durée.

En psychiatrie, nous combattons depuis plus de 10 ans dans plusieurs secteurs du soin des volontés de démédicalisation déjà bien installée à différents niveaux de l'organisation des soins.

Notre action syndicale va donc devoir se coordonner avec les autres syndicats de psychiatres privés et publics et universitaires (au sein du C.A.S.P.) pour s'opposer fermement et intelligemment à toutes les fragilisations, déqualifications et paupérisations des dispositifs de soin en psychiatrie.

Le secteur médico-social risque avec la loi de 75 révisée récemment sans aucune concertation avec les syndicats de psychiatrie de voir se poursuivre la démédicalisation de ce secteur où se retrouvent concentrés des enfants - adolescents et adultes dits «handicapés» à partir du moment où leur pathologie chronique n'atteint pas une phase aiguë.

Dans le secteur hospitalier privé (et public) c'est la volonté d'appliquer à la psychiatrie, le PMSI, (alors qu'aux États-Unis cela fait 10 ans que dans notre discipline l'échec de cette méthode a été prouvé). Cette sophistication gestionnaire nous paraît d'une lourdeur administrative et d'un compliqué sans apporter en contrepartie une réelle efficacité dans l'organisation et la gestion des soins. En pays de Loire l'A.R.H.* vient de supprimer l'agrément de la clinique institutionnelle E.S.P.E.R. de 64 lits la condamnant à fermer ses portes. Il est question de transférer 44 lits en secteur public. Nous comptons bien nous battre contre cet ordre gestionnaire et simplificateur.

En psychiatrie ambulatoire : nos soucis risquent de se mesurer à l'aune de notre réussite. En effet, l'augmentation tant en qualité qu'en efficacité de nos prestations a atteint plusieurs limites

1) du fait de l'inversion de la courbe démographique,

2) de la capacité de chaque praticien a éviter le «burn out» par une trop grande surcharge de travail pour une rémunération décroissante : les charges augmentent plus vite sans augmentation des honoraires.

Nous affrontons donc un paradoxe : la réussite de nos pratiques doit-elle la fragiliser ou amener les pouvoirs publics à nous faire déléguer à d'autres professions ?

C'est l'horreur économique : nous avons affaire à une «nomenclatura» gouvernementale, qui vise à être un excellent gestionnaire. Dans notre discipline cela donne une idéologie réductrice pour les soins coûteux dont nous assurons le développement et savons l'importance. Nous sommes actuellement rejoints dans notre lutte contre la démédicalisation des soins et prises en charge de nos malades par leurs familles (UNAFAM - UNAPEI) qui ont sur le terrain toutes les peines du monde à trouver satisfaction devant la pénurie qui s'installe çà et là et s'amplifie si rien ne vient changer l'évolution en cours.

Nous voulons donc rester des soignants et continer à recevoir des malades ce qui est l’essentiel de notre métier. En effet, d'autres missions nous sont demandées, nous réfléchissons à l'utilité et l'urgence de s'y investir.

Par exemble, nos efforts d'innovation, notamment en psychiatrie des enfants et adolescents se heurtent en exercice libéral à des difficultés encore bien réelles.

Sur le plan scientifique :

- notre revue a un nouvel éditeur, l’Esprit du temps,

- notre séminaire de printemps se prépare,

- les séminaires régionaux aussi,

- les Journées Nationales de Lorient des 4 - 5 -6 et 7 octobre 2001 sauront nous réunir autour du thème du «Métier de psychiatre».

Antoine BESSE

* (Agence Régionale d’Hospitalisation)


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