Avis

Patrick Stoessel
Retour au sommaire - BIPP n° 62 - Mai 2012

Chers amis,

Je souhaiterais connaître votre avis, celui des collègues sur un fait matériel trivial à première vue mais qui tend à prendre des proportions gênantes pour ma pratique. Je veux parler de l'envahissement croissant de ma ligne téléphonique par des appels inopportuns de marketing téléphonique. Il y a encore un an ou deux je ne recevais ce type d'appel qu'une à deux fois par mois. Actuellement, le phénomène est pluri-quotidien. Voici la lettre que j'ai adressée fi n avril au Président du Conseil national de l'Ordre des Médecins à ce sujet:

Monsieur le Président, Cher Confrère,

J'ai l'honneur de m'adresser à vous pour un problème qui tend à s'aggraver et porte directement atteinte à mon activité professionnelle.

Installé en cabinet à temps plein comme psychiatre psychanalyste depuis plus de 22 ans, je gère moi-même mes appels téléphoniques. Il m'est plus facile d'évaluer en direct le degré d'urgence de certains patients. Lorsque je suis en consultation je choisis de répondre ou de laisser sonner jusqu'à ce que l'appel bascule sur la messagerie vocale. Avec l'identifiant d'appel je peux reconnaître le numéro de téléphone de certains patients que je sais fragiles. Quelques mots échangés suffisent bien souvent à calmer une crise d'angoisse, à prévenir un passage à l'acte ou à modifier une posologie. Autant dire que le téléphone est pour moi un outil clinique et thérapeutique et qu'aucun secrétariat téléphonique ne saurait s'y substituer.

Cette gestion a un inconvénient : celui de risquer d'être interrompu en pleine séance de consultation ou de psychothérapie au moment même d'une élaboration féconde du patient qu'il ne faudrait pas perdre.

Aussi dans ce système dont j'assume le choix, tout appel de marketing téléphonique constitue une atteinte directe à l'exercice de ma spécialité. Certaines plateformes appellent jusqu'à plusieurs fois par jour tant que vous n'avez pas décroché. Il s'agit bien souvent d'appels masqués ce qui m'incite à ne jamais prendre en direct les appels masqués. Or parmi ceux-ci peuvent se trouver des patients en détresse. Pendant le temps de sonnerie ou les rares fois où je réponds quand même, la ligne est occupée bloquant un éventuel appel entrant urgent.

Il y a donc là pour moi une atteinte directe à l'exercice de ma profession, atteinte préjudiciable pour les patients.

Bien entendu l'inscription en « liste orange » sur l'annuaire est parfaitement inefficace de même que l'inscription, plus récente, sur le site Internet « Pacitel ». Le 22 mars dernier, j'ai déposé une plainte au commissariat contre un numéro qui a appelé avec insistance pendant plusieurs semaines, sans efficacité à ce jour.

Je pense ne pas être le seul parmi les confrères à subir ce phénomène et souhaiterais que le Conseil National de l'Ordre des Médecins puisse engager des négociations avec les opérateurs téléphoniques aux fins de trouver un moyen technique efficace pour protéger les lignes téléphoniques sensibles comme celles des médecins. A défaut, une action collective de nature judiciaire et/ou médiatisée pourrait-elle être envisagée ?

Je reste à votre disposition pour toute information ou contribution et espère que votre institution puisse être en mesure d'oeuvrer pour aboutir à une amélioration face à ce fléau.

En vous remerciant par avance de votre attention, je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, Cher Confrère, l'expression de mes salutations les plus confraternelles.

Je précise que les appels auxquels je fais allusion ,ne sont clairement pas des appels de patients. Au niveau du syndicat, peut-être pourrait-on tenter d'évaluer l'ampleur du phénomène par un questionnaire ou une enquête ? Ou bien encore lancer une pétition pour appuyer d'éventuelles démarches officielles ?

La défense syndicale de nos pratiques, de notre exercice passe, me semble-t-il aussi par la protection d'un outil de travail aussi essentiel que le téléphone.

Bien amicalement.


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