Courrier des lecteurs

Thérèse Allainmat
Retour au sommaire - BIPP n° 48 - Juin 2007
15 mai 2007

 

Cher Monsieur, Cher Confrère,

J’ai reçu votre dernière lettre et soutiens, bien sûr, vos positions. Je voudrais ajouter que l’avenant n° 10 est en train « d’assécher » la demande de soins en psychiatrie de façon drastique. Les patients qui venaient nous consulter sont des personnes très culpabilisées. Et renforçant leur culpabilité on les empêche de consulter. Mes demandes de rendez-vous ont chuté de 80 % après l’avenant et ce phénomène s’amplifie. J’avais, au moins, deux demandes par jour et maintenant à peine une fois tous les dix jours.

Que deviennent les patients qui ne consultent plus ?

- Vont-ils voir leur généraliste pour un traitement médicamenteux ?

- Ne font-ils plus aucune démarche de soin au risque d’aggraver leur souffrance ?

Et pour les psychiatres, quelles répercussions auront ces réductions de demandes de soin ?

Ce sera probablement la fin de notre exercice de psychiatres-psychothérapeutes. Si bien qu’il va devenir nécessaire et urgent pour les syndicats de psychiatres de réactiver la proposition qui a été faite dans le passé, d’adresser au psychiatre les patients traités par psychotropes depuis plus de 6 mois par leur généraliste. Je pense qu’il faut le faire rapidement car, les effets de l’avenant 10 vont se faire sentir dans l’année qui vient.

Nous n’aurons sans doute pas la possibilité en 2008 de renouveler tous nos arrêts de psychothérapie et nos consultations risquent de se réduire fortement. C’est ce que veulent les pouvoirs publics mais pas nous !…

Et ces patients qui ne consultent plus, vont-ils grossir les rangs des gens sous psychotropes au long cours ? Vont-ils (je pense aux jeunes) se mettre à boire, à prendre des toxiques ? Les jeunes anglais qui n’ont pas d’autre « traitement » de leur souffrance psychique que l’alcool y ont recours de façon tellement importante que cela pose un problème de santé publique en Grande-Bretagne.

Lorsque l’on refuse d’entendre la souffrance mentale dans une société, elle resurgit sous les formes les plus graves. Je pense à ce qui s’est passé aux États-Unis à ce jeune coréen psychotique meurtrier de 32 étudiants. Ce n’est qu’une forme de réaction au déni de la souffrance psychique dans ce pays.

Merci de continuer à défendre la psychiatrie française. Individuellement, nous pourrons y participer en vous soutenant.

Avec mes cordiales salutations.

Dr Thérèse Allainmat
Rennes


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