Qualifications

Gérard Bles
Retour au sommaire - BIPP n° 21 - Mars 1999

La mise en place de la Carte de Professionnel de Santé (C.P.S.) a ravivé un " vieux " problème, celui des rapports entre qualification en psychiatrie et option psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (P.E.A.).

Interrogé par le G.I.P./C.P.S. (structure qui assure la gestion et la mise en place de la C.P.S.), le Conseil National de l’Ordre (C.N.O.) répondait le 22 juillet 1998, sous la signature du Pr. Glorion son président : " qu’il existe pour les médecins relevant de l’ancien régime des études médicales deux qualifications dans le domaine de la psychiatrie : - une qualification en psychiatrie (spécialité ou compétence) – une qualification en psychiatrie option enfant et adolescent (spécialité ou compétence. Ces qualifications sont attribuées de plein droit aux médecins, titulaires des C.E.S. correspondants.[…] Il existe donc bien deux qualifications distinctes dans ces disciplines. ".

Questionné par plusieurs de nos adhérents, le même Pr. Glorion ajoutait, le 8 octobre 1998, que : " la qualification en psychiatrie peut être exercée de trois façons : - soit le médecin est titulaire du CES de psychiatrie générale : il est inscrit sur la liste des médecins spécialistes en psychiatrie avec exercice exclusif, - s’il a validé une option enfant et adolescent ou s’il a obtenu une qualification en pédopsychiatrie par la voie des Commissions de qualification, il peut soit exercer en psychiatrie générale […] soit opter pour l’exercice de la pédopsychiatrie en abandonnant la psychiatrie adulte. Dans cette hypothèse il est inscrit sur la liste des médecins spécialistes en psychiatrie option enfant et adolescent. ".

Devant ces conclusions absurdes (et contraires à des avis antérieurs du CNO), le S.N.P.P. , sous la signature de son Président, interpellait à son tour le Secrétaire général du CNO, le Dr Haehnel, en ces termes :

" Permettez-moi de revenir sur un " vieux " problème qui resurgit aujourd’hui comme le monstre du Lochness avec la mise en place de la CPS (carte professionnelle santé), celui de l’option psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent.

Je vous rappelle que cette option vient compléter le diplôme (DES ou CES) de psychiatrie en D.E.S.c. sans constituer une compétence autonome : elle indique un supplément de formation qui vient s’ajouter à la qualification en psychiatrie générale sans la supplanter et ne peut entraîner, dans l’un ou l’autre cas, une exclusivité d’exercice en rapport avec l’âge du patient. Ce dernier dispositif serait non seulement sans fondement réglementaire mais constituerait surtout une absurdité technique qu’il n’est même pas besoin, je pense, de détailler ici.

Ce fait avait d’ailleurs été rappelé par vos soins, il y a quelques années, aux Ordres départementaux.

Or la question resurgit avec l’établissement de la CPS et nous avons eu la surprise de lire, sous la signature du Pr. Glorion (réf. : CBG/SR/FM R98 189 182) un avis adressé au GIE/CPS indiquant l’existence de deux qualifications distinctes en psychiatrie.

On peut imaginer les conséquences que cette interprétation peut entraîner, en particulier dans les relations des psychiatres avec l’Assurance Maladie (concernées au premier chef par la CPS).

En tout état de cause, la détention de l’option ne devrait avoir de véritable effet que vis à vis des institutions s’occupant d’enfants, dans le recrutement de leurs collaborateurs psychiatres, mais demeurer sans conséquence sur la pratique de ville sauf à indiquer aux patients une orientation particulière (au même titre que l’homéopathie, etc).

Cela signifierait autrement qu’un psychiatre " général " peut tout faire (par définition), mais qu’un psychiatre option enfant-adolescent ne peut examiner et traiter d’adultes - ce à quoi il est formé - ne peut s’occuper par exemple de la mère (si souvent impliquée dans le couple mère/enfant), ou doit cesser de suivre un adolescent à 18 ans ( ! !).

Il est urgent de modifier rapidement le libellé des CPS - et l’avis du Conseil National de l’Ordre sera déterminant pour cela. "

Le CNO interrogeait alors la Direction Générale de la Santé (Dr. Botreau-Roussel) sur cette épineuse question. Il ne semble pas que les suites de cette consultation aient clarifié le problème (mais peut-être la question était-elle mal posée ?). Cependant le CNO, sous la signature de P.Haehnel, adressait le 4 février 1999 aux Conseils départementaux la circulaire suivante (99 019) :

" L’attention [du CNO] a été attirée par un certain nombre de médecins psychiatres et pédopsychiatres sur le libellé qu’ils devaient porter sur le formulaire de la carte professionnelle de santé concernant leur qualification.

Ceux-ci ne voulaient pas entendre qu’il existe deux qualifications distinctes concernant le domaine de la psychiatrie, à savoir : la psychiatrie générale et la pédopsychiatrie pouvant être exercées chacune d’entre elles à titre exclusif en tant que spécialité.

Pour mettre fin à cette polémique, nous avons saisi dans un premier temps la Direction Générale de la Santé afin qu’une rubrique complémentaire concernant les compétences médicales ou les DESC puisse être ajoutée.

Il semblerait que cette demande n’ait pas été, à ce jour, accueillie favorablement et c’est la raison pour laquelle il a été décidé d’autoriser les médecins psychiatres, titulaires de l’option enfants/adolescents, de mentionner derrière la rubrique " spécialiste qualifié en… " : psychiatrie (adultes ou enfants et adolescents).

Nous vous invitons à porter cette nouvelle mesure à la connaissance des médecins qualifiés en psychiatrie de votre département. ".

On ne peut pas dire, comme y insiste Jacques Barbier, délégué régional Champagne-Ardennes, que ce dernier texte soit, dans sa condescendance, propre à clarifier définitivement l’antique controverse qui soulève bien, au delà des points de forme, des questions de fond – ni qu’elle épargne " les contentieux futurs [en cas d’] interprétation tendancieuse…d’une autorisation molle… ". Cela résout provisoirement cependant les cas où les Caisses, par exemple, contesteraient la réalisation d’un acte pour adulte par un psychiatre option PEA – pour autant que cet avis soit accepté comme ayant valeur réglementaire… Mais il faudra bien que la discipline obtienne un jour une mise au point définitive sur des dispositifs dont l’exploitation, quoi qu’on en ait, porte atteinte à son unicité.

 

Gérard Bles


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