Réponse du SNPP

Retour au sommaire - BIPP n° 35 - Mars 2003

Monsieur le Ministre,

Je vous remercie de votre courrier du 5 février témoignant de l’intérêt que vos portez aux pratiques privées de la psychiatrie.

Ainsi que vous le rappelez, nous avons bien pris note que l’accord du 10 janvier ne constitue pas encore l’état définitif du texte conventionnel. Cependant, tout laisse craindre que la future convention ne vienne pas substantiellement modifier les termes de cet accord en ce qui concerne la revalorisation des honoraires des psychiatres libéraux. Si nous en avions douté, la réunion du 29 janvier dernier, spécifiquement consacrée à ce point dans le cadre des négociations conventionnelles, nous a ôté nos dernières illusions.

Nous sommes un syndicat responsable : nous sommes donc conscients que, du point de vue des financeurs, une augmentation de 5 % de notre acte de consultation après 8 ans de blocage des honoraires peut sembler une avancée considérable, et ceci d’autant plus que des revalorisations ultérieures restent à l’ordre du jour. Nous prenons également la mesure des limites du budget que le pays peut consacrer à l’assurance maladie.

Toutefois, il est aussi de notre responsabilité de vous informer que, si importante que la revalorisation proposée puisse paraître du point de vue des tutelles, elle est vécue comme une insulte par l’ensemble de la profession. Plus de 700 millions d’euros ont été trouvés pour financer sur deux ans l’ensemble des mesures prévues par l’accord du 10 janvier, qu’ils s’agissent de revalorisations d’actes cliniques ou techniques. Le fait que, sur cette masse, seuls 26 millions soient consacrés aux psychiatres ne peut être compris autrement.

En outre, il n’est pas exact de considérer que cette enveloppe entraînera une augmentation du revenu des psychiatres de l’ordre de 4 700 euros par an. En effet, les Caisses s’opposent à ce que l’enveloppe soit consacrée à une revalorisation uniforme de l’acte de consultation et souhaitent la réserver aux premières consultations uniquement. Dans la mesure où le dispositif de soins psychiatriques est complètement saturé, les premières consultations deviennent rares et cette disposition profitera en fait surtout aux neurologues, dont l’activité est essentiellement constituée de premières consultations, alors qu’ils bénéficient pourtant déjà d’actes techniques très rémunérateurs parallèlement à leur pratique clinique.

Vous n’êtes pas sans ignorer que les revenus les psychiatres libéraux demeurent les plus bas revenus en médecine libérale depuis 30 ans. Cela fait 30 ans que les psychiatres espèrent un sursaut du Politique pour ramener leurs revenus dans la moyenne des revenus médicaux.

Vous n’êtes pas non plus sans savoir que nous sommes la spécialité la plus fortement conventionnée en secteur I (76 %) : c’est assez dire que les psychiatres, dans leur écrasante majorité, sont attachés à l’idée d’une prise en charge socialisée de l’assurance maladie. Cela est essentiellement lié au fait que, contrairement à ce que prétendent certains rapports officiels rédigés par des experts sans aucune légitimité, la psychiatrie privée consacre une part importante de son activité à la prise en charge des pathologies lourdes qui entraînent malheureusement précarité et désinsertion sociale.

Il n’est que de constater le pourcentage des patients bénéficiant d’une A.L.D. pour s’en convaincre. Nous l’estimons à 30 % des deux millions de patients pris en charges chaque année par les psychiatres privés mais vos services pourront vous fournir le chiffre exact. Pour cette raison, les éventuels aménagements tarifaires qui pourraient se trouver dans de nouvelles règles concernant le D.E. ne peuvent constituer une solution, du moins pour les patients qui ont le plus besoin de nos compétences.

À l’heure où les besoins en santé mentale font l’objet d’alertes de plus en plus insistantes de tous les observatoires nationaux et internationaux, comment les professionnels qui se trouvent au cœur de ce domaine peuvent-ils comprendre que leurs pratiques ne soient pas davantage prises en compte par les tutelles ?

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de nous accorder une entrevue afin que nous puissions vous exposer de vive voix les problèmes que la faiblesse de la revalorisation envisagée risque de provoquer, non seulement pour les professionnels mais aussi pour les patients eux-mêmes.

Vous en remerciant par avance, je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’expression de ma haute considération.


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