La fracture : du minimum au maximum

Pierre Cristofari
Retour au sommaire - BIPP n° 36 - Septembre 2003

Le choix du secteur 1 fut un marché de dupes.

Nos collègues plus sages qui avaient choisi le secteur 2 peuvent demander à leurs patients des honoraires un peu plus élevés, permettant à leurs revenus, sinon d'augmenter, du moins de stagner. Alors qu'en secteur 1, les revenus baissent et le pouvoir d'achat s'effondre, à travail constant.

L'argent a quelque chose de commode : il est quantifiable. C'est pour ça qu'on le met aujourd'hui au premier plan, même si c'est le symptôme d'un mépris pour la maladie mentale qui devient inquiétant.

Nos pudeurs nous reviennent dans la figure : parler d'argent était indélicat, et nous n'avons jamais osé évoquer une politique de revenus pour les médecins libéraux. Il est vrai qu'un tel discours comporte des écueils : quand on parle de minimum, on en vient tôt ou tard à parler de maximum.

Par solidarité, par élégance peut-être vis-à-vis de spécialistes mieux lotis que nous, nous sommes aujourd'hui en face d'un chameau à deux bosses. D'un côté, des médecins à hauts revenus, spécialistes de secteur 2 ou à plateau technique permettant bien d'autres actes que les consultations ; de l'autre des médecins symbolisant cette paupérisation des classes moyennes. Ce sont les spécialistes qui vivent de leurs consultations en secteur 1 et les généralistes.

Cette situation est d'autant plus malsaine, que ceux d'entre les médecins qui ont des revenus modestes, ne sont pas ceux qui travaillent le moins.

Tous les médecins doivent comprendre que notre unité passe par l'absence de disparités trop criantes. En l'occurrence, privilégier aujourd'hui l'augmentation des revenus des moins bien lotis eut été une garantie collective pour l'avenir : en particulier, que des disciplines seront choisies par nos jeunes confrères pour leur attirance et non pour leur revenu. Tout le monde a à perdre dans un système devenu tellement inégalitaire.

Or, pour les psychiatres, ce projet de RCM avec un CNPsy à 37 euros, c'est le fossé avec nos confrères qui continue de se creuser, quand on nous faisait miroiter un rattrapage.

Pierre CRISTOFARI

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