Lettre ouverte aux parlementaires

Retour au sommaire - BIPP n° 61 - Février 2012
Paris, le 6 février 2012

Monsieur le Président,

Nous avons pris connaissance d'une proposition de loi déposé par un député de la majorité visant à interdire la psychanalyse comme mode de soin de l'autisme, et la nature même de ce projet nous a profondément choqués, tant sur le fond que sur la forme. En effet, sur le fond :

• Il nous semble que l'appréciation de l'intérêt d'une technique ou d'un mode de compréhension d'une affection mentale nécessite une connaissance approfondie du sujet et donc le recours à l'avis de professionnels spécialisés dans le domaine ;

• Il serait très dommageable pour les autistes, leurs familles et pour toute la psychiatrie de l'enfant comme de l'adulte, que soient ainsi adoptés des avis tranchés caricaturaux sur des questions qui requièrent impérativement des approches multiples et composites en pratique, comme il est de règle dans notre discipline comme dans bien d'autres.

Mais plus encore sur la forme, il nous parait grave que ce sujet soit ainsi politiquement exploité dans les media, et plus encore, qu'il soit question d'en faire un projet de loi : une loi a-t-elle à faire avec des questions techniques de ce genre ? A-t-elle pour tâche de définir les modes de pensée autorisés ou interdits ?

C'est donc en tant que citoyens que nous souhaitons vous interpeller, et attirer votre attention sur le risque non calculable qu'il y a à dévaluer ainsi la notion de loi, qui chaque jour un peu plus cesse de figurer le registre de référence de ce qui régit les rapports sociaux dans leurs principes, pour constituer celui des réponses immédiates aux questions d'actualité propulsées dans et par les media.

La responsabilité des élus nationaux nous semble à ce titre très engagée, et nous souhaitions par la présente rappeler la valeur symbolique de la loi et son importance pour les sujets qui composent cette société, à condition qu'on lui permette de tenir sa place et la dignité de sa fonction.

Il nous semblerait opportun de rappeler aux éminents membres de cette assemblée l'impact psychologique de leurs propositions, et le risque de déstructuration du lien social que certaines peuvent contenir.

Nous vous prions, Monsieur le Président, de croire en l'expression de nos salutations respectueuses et de nos convictions républicaines et démocratiques.

Dr Michel Marchand - Président de l'AFPEP - SNPP

Dr Élie Winter - Secrétaire Général de l'AFPEP - SNPP


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