Lettre aux députés

Retour au sommaire - BIPP n° 38 - Mars 2004

Madame, Monsieur le Député,

Vous allez prochainement examiner à l’Assemblée Nationale l’amendement (Mattei) 363 de la Loi de Santé Publique, initialement intitulé amendement Accoyer avant son passage au Sénat.

L’objectif initial de cet amendement était de clarifier l’offre de soins en santé mentale en déterminant quels professionnels sont à même de conduire des psychothérapies afin de protéger les usagers ayant recours à des professionnels s’intitulant psychothéra-peutes sans aucune qualification reconnue et sans lisibilité quant à la nature de leur pratique.

Or, les propositions retenues lors de la discussion au Sénat s’écartent de cet objectif sur deux points fondamentaux :

D’une part, la création du titre de psychothérapeute, dans lequel bon nombre des professionnels concernés chercheront à s’engouffrer, accroît la confusion déjà existante autour du terme psychothérapeute dont l’usage galvaudé a débouché sur l’exigence d’une loi de clarification. L’introduction de ce nouveau statut nous paraît donc exactement contraire à l’ambition de mieux assurer la sécurité du public, et ceci d’autant plus que ce texte omet de rappeler la compétence du psychiatre en matière de psychothérapie.

D’autre part, le fait que ce texte ne précise pas ce qu’est la psychothérapie risque d’être source de grandes confusions. La psychothérapie est une dimension des soins psychiques qui ne peuvent être prodigués que par des professionnels dûment formés, psychiatres et psychologues, clairement inscrits dans le domaine de la santé. Sa pratique repose sur une formation initiale universitaire et une formation complémentaire à la psychothérapie impliquant une démarche personnelle, une formation théorique et une pratique clinique réélaborée continuellement au contact des patients et de ses pairs.

Nous déplorons donc que la compétence du psychiatre, la spécificité et la complexité de la dimension psycho-thérapique de notre pratique soient complètement niées et amalgamées à celle d’autres professionnels. Cela montre bien que la psychothérapie ne peut en aucun cas se réduire à une technique et nécessite en revanche une inscription pérenne du professionnel dans le champ sanitaire.

Ces deux points soulignent les risques de dérives si l’amendement soumis à votre délibération devait être adopté en l’état.

Concernant l’exercice de la psychanalyse, la formulation retenue dans l’amendement Mattei paraît tout à fait conforme à cette pratique.

Aussi, le meilleur texte de Loi ne serait-il pas que nul ne devrait se prévaloir du titre de psychothérapeute ? Cela maintiendrait la psychothérapie dans le domaine du soin où elle doit demeurer, tout en offrant au public la garantie de formation des professionnels du champ sanitaire. De ce fait, les professionnels d’autres champs non réglementés seraient conduits d’eux-mêmes à exposer plus explicitement leur formation ainsi que l’objet de leur pratique, ce qui contribuerait également à une meilleure orientation des usagers.


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