Editorial

Michel Marchand
Retour au sommaire - BIPP n° 59 - Juin 2011

La psychiatrie : une profession qualifiée ou déqualifiée ?

Telle est la question qui se pose face à l'abrasion systématisée de la fonction du psychiatre et de sa reconnaissance, tant du point de vue du projet de loi en cours que des actuelles négociations avec l'Assurance Maladie.

Les débats et les votes en Assemblée Générale de l'AFPEP-SNPP, suivis de l'élection d'un nouveau Bureau, ont campé la donne actuelle, en soulignant la nécessité d'informer mieux encore les adhérents et de sensibiliser l'ensemble des psychiatres d'exercice privé aux enjeux fondamentaux de ce qui se joue aujourd'hui.

Qu'observons-nous ?

L'extension des prérogatives des préfets au détriment de l'indépendance des psychiatres et l'extension de l'hospitalisation sous contrainte aux soins sans consentement (pour les psychiatres comme pour les patients !).

La subordination de notre pratique quotidienne et de l'évolution de nos revenus aux critères économiques et technico-administratifs de l'Assurance Maladie.

Le transfert programmé et continu de la couverture des soins de la solidarité nationale vers les assurances à but lucratif.

L'évolution délibérée vers des contrats individuels proposés aux médecins, indexés à une performance définie par les assureurs.

La dénaturation de notre fonction soignante et son glissement vers une dimension expertale.

La tentative de démantèlement de l'acte de consultation et son corollaire, la délégation de tâche.

Au travers de cette longue liste se profile, vous l'avez bien compris, le devenir de notre métier de l'indépendance et de l'engagement des psychiatres dans leur exercice, de l'accès aux soins pour tous.

Nous avons affirmé clairement nos positions sur les deux fronts du moment :

- Le texte de loi réformant la loi de 90 :

Après un simulacre de concertation à l'Assemblée Nationale, nous avons été auditionnés de façon attentive et constructive par la Commission des Affaires Sociales du Sénat pour constater en fin de compte un vote partisan niant tous les amendements issus des échanges avec l'ensemble de notre profession.

Nous avons adressé une première missive à chaque sénateur puis une lettre ouverte à tous les parlementaires (voir plus loin la position du syndicat et la teneur des courriers).

- Les négociations conventionnelles :

Nous avons fermement rappelé nos revendications lors des contacts avec les responsables des trois centrales syndicales à même de relayer nos positions, la FMSF, l'UMESPE et le SML, pour découvrir des modalités de négociation basées sur le principe de la servitude volontaire, l'Assurance Maladie fixant le cadre et le contenu des discussions.

Il en ressort, de la part de l'Assurance Maladie, une proposition totalement dérisoire pour les psychiatres : la mise en place d'un acte de consultant pour guider les généralistes dans la prescription des psychotropes au long cours, de façon à induire des économies pour l'Assurance Maladie (voir plus loin notre communiqué à ce sujet).

Rendus à ce point de la négociation, au moment où nous écrivons ces lignes, nous ne pouvons que refuser cette aumône insultante et garder notre âme en maintenant à tout prix le cadre de notre pratique : un acte unique et indivisible, à revaloriser significativement, et le retour à un accès direct pour tous*.

La tâche est rude, et notre détermination est entière pour maintenir, contre tous ces vents contraires, l'éthique de notre métier.

Tenir ce cap, c'est garantir la reconnaissance de notre qualification et l'avenir de la psychiatrie.

Telle est notre ambition, forts de la contribution de chacun et chacune d'entre vous.

*Il apparaît depuis que nous pourrions obtenir quelque avancée sur le CPsy : nous vous en informerons dans la newsletter.


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