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18/05/2011

Lettre aux psychiatres - Télétransmission et usage du titre de psychothérapeute


Les pressions concernant la télétransmission et l’usage du titre de psychothérapeute sont de plus en plus fortes. Devant vos nombreuses questions au SNPP, une mise au point est utile pour aider chacun à s’y retrouver.

Paris, le 18 mai 2011

Chère consœur, cher confrère,

Les pressions concernant la télétransmission et l’usage du titre de psychothérapeute sont de plus en plus fortes. Devant vos nombreuses questions au SNPP, une mise au point est utile pour aider chacun à s’y retrouver.

Concernant l’inscription au registre national des psychothérapeutes :

Les ARS exercent une nouvelle pression sur les psychiatres, nous demandant si nous souhaitons être inscrits sur le registre national des psychothérapeutes. Pour le SNPP, il y a là un triple risque. D’abord de créer un nouveau clivage dans la profession, entre ceux qui sont inscrits (donc reconnus comme psychothérapeutes quelque que soit d’ailleurs leur formation) et les non-inscrits (qui n’auraient plus aucune fonction psychothérapique ?). Il nous semble au contraire nécessaire de défendre que tout acte psychiatrique comporte une fonction psychothérapique consubstantielle de notre métier (cf revue « Psychiatries » n° 143 – Le psychiatre et la psychothérapie). L’autre risque qui en découle est le morcellement de l’acte unique CNPsy, en consultations avec ou sans psychothérapie. Enfin, nous imaginons mal nous retrouver sur une liste commune des psychothérapeutes, où on trouverait tout et n’importe quoi, et qui servirait d’argument pour favoriser la délégation de tâche : si d’autres sont sur la même liste, il est facile de croire qu’ils sont interchangeables.

Nous proposons à chaque psychiatre sollicité par l’ARS ou l’ordre des médecins la réponse suivante (à adapter) : 

J'ai bien reçu votre courrier m'invitant à m'inscrire sur le registre national des psychothérapeutes, et ceci avant le 1er juillet 2011.

Je suis tout à fait surpris(e) de cette invitation : en effet, tant du fait de ma pratique que du fait de l’esprit de la loi récemment promulguée, je suis de fait psychothérapeute, et ceci évidemment sans avoir attendu d'être inscrit(e) sur quelque registre que ce soit.
Vous êtes fort bien placé pour savoir qu'il n'existe qu'un seul acte du psychiatre, et ceci quelle que soit la technique utilisée dont le choix est laissée à  la responsabilité du praticien, qu'il s'agisse de prescription médicamenteuse, de psychothérapie ou autre, choix adapté au cas par cas à partir de la relation établie avec le patient.

Par ailleurs vous disposez de tous les documents justifiant de ma qualification de psychiatre, c'est pourquoi je m'étonne de votre invitation à m'inscrire sur le  registre des psychothérapeutes.

Mon syndicat, le SNPP (Syndicat National des Psychiatres d’Exercice Privé) demande donc la modification des décrets d’application de l’usage du titre de psychothérapeute qui ne peut en aucun cas être une nouvelle contrainte pour les psychiatres alors qu’il visait initialement à lutter contre les dérives sectaires.

Veuillez agréer chers confrères l'expression de mes salutations distinguées.

En parallèle, le SNPP écrit au Ministre de la Santé, à l’ordre des médecins et aux ARS un courrier explicatif demandant une modification des décrets d’application de « l’amendement Accoyer » dont l’esprit initial de lutte contre les dérives sectaires nous semble assez loin…

Télétransmettre ou ne pas télétransmettre ?

Depuis bientôt 12 années, la télétransmission est obligatoire pour tous les médecins.
La CPAM avait envisagé récemment de faire payer aux médecins récalcitrants les feuilles de soin à hauteur de 50 centimes par feuille non télétransmise : cette sanction a été jugée anticonstitutionnelle par le Conseil d'Etat, elle n'est donc plus d'actualité.
Notons cependant que, malgré les pressions et les menaces de sanctions réitérées, 55% des psychiatres ne télétransmettent toujours pas les feuilles de soin, et notons par ailleurs que ce chiffre est tout à fait spécifique de la corporation des psychiatres, les autres médecins télétransmettent beaucoup plus.

Quelle est la position du SNPP à  ce sujet ?

Nous encourageons le maximum de résistance à cet ordre de télétransmettre. Pourquoi ?
Chacun d'entre nous peut vérifier sur « l’espace pro » de ameli.fr, que l'utilisation de la carte vitale d'un patient nous informe immédiatement de ses différentes consultations, prescriptions, examens effectués, et ceci sans que nous ayons besoin de le lui demander. Le patient est littéralement court-circuité dans ce processus et la relation thérapeutique est forcément  mise à mal puisque, à la limite, on s'en passe !

Par exemple il est bien différent d'apprendre, par l'utilisation de sa carte vitale, que le patient est allé demander un autre avis à un collègue ou de l'apprendre parce qu'il a décidé de nous en parler ce jour là, à ce moment là, alors qu'il était question de ceci ou cela, et que cette information est alors tricotée dans la relation thérapeutique ...

D'autre part, la feuille de soin n'empêche pas la transmission des informations dans le dossier du patient, mais cette transmission n'est pas de notre fait. C’est là aussi une différence notable.
Nous ne sommes pas sans savoir que ce qui commande tout ce processus n'est rien d'autre que le pouvoir des groupes financiers qui, via les mutuelles et les assurances privées et tout le processus d'informatisation, grignote sans cesse davantage notre marge de liberté. Tout va dans le sens de leur donner toujours plus de pouvoir : qu'il s'agisse d'envisager un traitement plutôt qu'un autre, qu’il s’agisse de choisir un médecin plus accommodant des exigences de ce pouvoir financier plutôt qu'un autre, qu’il s’agisse de l’éligibilité à un crédit immobilier quand l’assureur du prêt appartient au même groupe que l’assurance de santé (c’est souvent le cas des banques qui proposent des « packs assurantiels ») ou encore, qu’il s’agisse des effets du coût des mutuelles en fonction de l’état de santé du patient, etc.

Rien ne nous oblige à obtempérer aux exigences d'un système financier dont nous récusons à toute force la logique exclusivement féroce qui fait fi de toute forme de solidarité. Nous  l'observons sans cesse dans l'amoindrissement des remboursements de la sécurité sociale, dans l’augmentation des franchises, etc.

Avoir conscience de ce processus nous paraît important, y compris dans la façon dont nous en tiendrons compte dans la relation thérapeutique, notamment de notre côté, en expliquant à l'occasion au patient, mais aussi en nous incitant à être dans une position subjective plus active sans nous contenter de subir les aléas d'un système qui nous dépasse. Nous sommes bien placés pour savoir que lorsque nous sommes plus actifs et vigilants sur ces questions, notre façon d'écouter le patient n'est pas la même que si nous nous résignons à supporter sans broncher des diktats résolument contraires à notre éthique.

C'est pourquoi nous vous invitons à résister autant que possible, chaque fois que vous le pourrez.

L’actualité syndicale va de plus en plus vite, nous obligeant à réfléchir à nos engagements plutôt que de nous laisser brusquer. Le SNPP vous propose de vous tenir informé via notre courrier électronique : « newsletter Caractère(s) ».

Inscrivez vous en écrivant à info@afpep-snpp.org

Et n’oubliez pas, le travail du syndicat dépend de vos cotisations aussi… 

Dr Michel MARCHAND Président de l’AFPEP – SNPP
 Dr Jacqueline LEGAUT  1ère Vice-Présidente 
Dr Elie WINTER Secrétaire Général