Du Dossier Médical Personnel

Marc Maximin
Retour au sommaire - BIPP n° 39 - Octobre 2004

Et ce brusque effet d’annonce autour d’un outil fondamental du travail du médecin qu’est le Dossier Médical, dont la pertinence et l’utilisation n’ont jamais été remis en question ?

Que vient signifier là le mot personnel ?

Ce dossier qui a toujours existé et existera toujours, car tout médecin fait du lien avec son patient de toutes manières pour les contre-indications ou intolérances connues, et au mieux pour resituer son histoire en tant que malade dans une démarche de soins.

Mais ce n’est pas parce que la santé est devenue un bien de consommation gratuit, illimité et un droit définitivement acquis que le médecin a perdu tout sens de ses responsabilités.

Même si des fautes, des abus existent comme dans tout fonctionnement, n’oublions pas l’illusion sécuritaire protectrice, totalement désincarnée dans un contexte où plus qu’à la prévention le mot d’ordre est à la précaution sans limites.

Mais après tout on n’est plus à ça près pour faire passer une réforme et attention de ne pas tomber dans le piège… car ce n’est pas de Dossier Médical dont il s’agit.

N’argumentons pas sur ce point car ce serait un faux débat qui derrière un argument de "meilleur traitement et de suivi plus efficace", décline en filigrane des dérives inacceptables pour tout citoyen.

Ce DMP est d’abord dangereux pour les libertés individuelles en constituant un véritable "fichier", sans réelle garantie de protection, qui ne prend pas en compte les volontés de chacun, et ne respecte pas les droits fondamentaux de la personne.

Par ailleurs il crée aussi un marché des données personnelles médicales hébergé sur des serveurs centralisés que se disputeront demain les compagnies qui ont déjà les logiciels médicaux et auxquelles les assureurs santé demanderont à accéder.

Quand on sait que la CNIL a perdu ses prérogatives cet été pour ne garder qu’un avis consultatif on ne peut que s’inquiéter devant cette évolution, cet état de fait qui s’inscrit dans une dominante de transparence, de contrôle et de vérification.

Qu’en sera-t-il du devenir de la confidentialité et du secret médical comme garant de l’égalité des personnes sur un plan social et citoyen, quel que soit leur état de santé ?

Enfin ce DMP met le médecin en position de régulateur social à dominante financière, du fait de l’obligation d’attester de la présentation de ce "dossier" pour être remboursé.

C’est donc bien autour du paradoxe de l’emploi du mot "personnel" qu’il faut recentrer le débat.

En effet "personnel" désigne ce qui s’attache à la personne par opposition à ce qui concerne les biens. Or tout est fait à travers ce DMP dans un but de contrôle et de répression financière.

Voilà bien là l’enjeu de notre opposition au DMP, comme lutte qui concerne tout citoyen pour la défense de valeurs fondamentales et qui ne se résument bien sûr pas à une notion de suivi ou de meilleurs traitements...

Marc Maximin
Marseille


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