Lettre aux présidents des centrales syndicales
18 septembre 2008
Cher Président et Cher Collègue
Notre avenir professionnel est actuellement en cours d’élaboration dans ces deux textes : le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale et la loi “Hôpital, Santé, Patient et Territoire”.
Des fuites, sans doute volontaires, dans la préparation de ces deux textes en disent long sur les intentions des technocrates des ministères au service d’élus politiques prêts à entériner ces orientations-là si nous réagissons en ordre dispersé. Ces effets d’annonce invraisemblables et leurs retraits partiels devant l’opinion publique nous préparent à accepter des mesures peut-être moins drastiques qui n’en sont pas moins des coups de canifs successifs mettant à mal l’essence même de notre pratique.
Nous assistons à une attaque sans précédent contre la pratique libérale dans un double mouvement d’étatisation et de verrouillage de l’exercice de notre métier dans toutes ses dimensions (choix thérapeutique, prescription, confidentialité, formation, etc..).
Pour exemple, ne retenons que quelques points :
- Cette manière de nous prendre en otages en « transformant le revenu des médecins libéraux en variable d’ajustement des comptes de la sécu et les pousser à maintenir leurs honoraires en rationnant les soins » comme le dit très justement Michel Chassang. Alors que dans le même temps on multiplie les exonérations de cotisations sociales dont la dernière en date concerne les primes de transport privant ainsi une fois de plus l’assurance-maladie de revenus.
- Les sanctions envisagées d’un éventuel refus de reporter dans le dossier médical personnel « les éléments issus de chaque acte ou consultation » au mépris du droit des patients à la confidentialité non partagée. (PLFSS)
- Les directeurs de caisse d’assurance-maladie érigés en « nouveaux juges de la déontologie médicale » comme s’insurge à juste titre l’Ordre des médecins.
- L’introduction de contrats individuels et d’une rémunération à l’intéressement dans le mépris de la vie conventionnelle en isolant les médecins dès lors vulnérables à toutes les pressions.
Ces textes nous sollicitent à deux niveaux, idéologique d'une part et en termes de rapport de forces d'autre part.
Nous ne pouvons pas nous contenter de préserver le Secteur 2 et négocier le secteur optionnel, qui s'annonce déjà très limité et très encadré, même s’ils sont tous deux emblématiques d’une pratique libérale.
Nous ne pouvons pas nous contenter de l’installation d’une codification de la consultation complexe (C2), que l’on peut craindre elle aussi très limitée et très encadrée, comme succédané d’une CCAM dont la mise en place, toujours retardée, risque de ne jamais voir le jour.
Mettre médiatiquement en avant des intérêts particuliers et des petites soumissions nous affaiblit considérablement et fait le jeu du dénigrement orchestré de la profession.
Face à une offensive d’une telle ampleur, l’unité des médecins libéraux nous paraît un préalable indispensable. Il est trop aisé pour nos adversaires de s'engouffrer dans nos lignes de partage, misant sans aucun doute sur elles pour asseoir leurs positions.
Pourtant, des points fondamentaux rassemblent les médecins libéraux et au-delà :
- L’éthique et l’indépendance professionnelle.
- La déontologie et la juridiction adaptée qui s’y rattache.
- L’attachement au système conventionnel et au paiement à l’acte.
Nous ne savons pas encore quelles devront être la nature et l’ampleur de nos réactions, mais ne pouvons-nous pas déjà mettre au grand jour les bases de notre unité.
Vos fonctions à la tête de centrales syndicales au rôle prépondérant vous donnent ce pouvoir dans l’intérêt de tous les médecins libéraux. Il y va de votre responsabilité historique de faire au minimum cause commune en ce qui concerne nos fondamentaux, garants d’une médecine humaniste.
Il s’agit de montrer haut et clair l’unité du corps médical devant des valeurs intangibles :
- Dans le soutien unanime au Conseil de l’Ordre dans sa fonction juridictionnelle garante de
la déontologie.- Dans le refus du transfert de responsabilité sur les médecins de l’incurie politique.
L’unité de la profession est peut-être notre seule force, mais elle est loin d’être négligeable en cours de négociation. Cette unité existe, montrons-la ! L’effet médiatique sera sans précédent.
Nous ne prétendons pas vous apprendre quoi que ce soit. Tout ce que nous rappelons vous le connaissez autant que nous. Mais à l’aune de ces circonstances exceptionnelles, nous vous demandons simplement de mettre de côté les vieilles ou moins vieilles divergences pour réagir d’une seule voix.
Que cela prenne la forme de déclaration solennelle commune sous forme de communiqué de presse voire d’une réunion pour l’élaboration d’une charte, peu importe. L’heure est à l’unité de notre message.
En vous remerciant de l’attention que vous porterez à cette requête, nous vous adressons nos salutations amicales les meilleures.
Syndicalement vôtre,
Président du SNPP