Reims - Journées Nationales 1984

Du rêve

C’est bien de l’activité onirique du sommeil dont il sera question là, pour l’essentiel – écartée la rêverie éveillée où s’envole « l’imagination créatrice »…

Une telle « réduction » reflète à l’évidence ce qui, du rêve, est devenu pour nous « objet technique ».

Certes le songe adressé par les dieux, le message prémonitoire, la voix des spectres, gardent pour nous leur résonance sacrée, mythique. Mais, là encore, la science est venue ébranler les colonnes du temple : désormais, les paramètres bio-physiologiques du rêve hypnique sont supposés connus, à travers l’identification du « sommeil paradoxal » – comme quelque chose de sa rigoureuse nécessité vitale. Alors que rien de semblable ne peut être avancé pour ce qui concerne la rêverie diurne…

Cependant, il ne s’agit là que d’un repérage « externe » et d’une temporalisation qui ne nous disent rien du rêve en tant que tel. Et c’est sans rien entendre de son texte ou de son expérience subjective que nombre d’hypothèses sur son rôle ont pu être avancées, comme par exemple celle d’une « reprogrammation de l’hérédité » (JOUVET) ou d’une fonction de « désapprentissage » ou, mieux, « d’oubli » (CRICK et MITCHISON).

« Le rêve – écrit VALERY – est une hypothèse, puisque nous ne le connaissons jamais que par le souvenir, mais ce souvenir est nécessairement une fabrication… Nous construisons, nous redessinons nos rêves ; nous nous l’exprimons, nous lui donnons un sens ; il devient narrable… »

C’est pourtant à partir de ce texte et cette expérience, et de leur « fabrication » même, que FREUD va modéliser le fonctionnement du processus primaire, érigeant dès lors le rêve en prototype des formations de l’inconscient – sans pour autant en faire la « voie royale » de la cure elle-même, telle que d’autres ont pu la privilégier.

Dès lors s’est ouverte l’histoire de l’objet-rêve, jusque et y compris celle de sa perversion, le rêve-objet manipulé en venant, entre analyste et analysant, à être non plus une « parole qui circule » mais « une monnaie » (PONTALIS).

De la clef des songes au rêve du passe-partout, le rêve a bien fait errer. Et, devenu objet, d’étude, d’échange ou d’aveuglement, il n’a, pas plus qu’un autre objet, échappé à la fétichisation.

Qu’avons-nous à en dire, à partir de notre expérience quotidienne, clinique et thérapeutique ?