Antoine Besse

Jacques Barbier
Retour au sommaire - BIPP n° 63 - Décembre 2012

C’est au Cheminaire de Lucien Kokh que j’ai rencontré Antoine Besse. Nous étions tous les deux jeunes, débutants en psychiatrie et passionnés des débats théoriques foisonnants à l’époque. Chacun s’était déjà engagé dans des pratiques institutionnelles et en privé.

Je lui sais gré d’avoir sensiblement dérangé ce qu’étaient mes convictions franco-centristes de la psychiatrie en me faisant comparer ce qu’il avait appris en Suisse où il avait étudié la psychiatrie avec les façons de penser et de pratiquer «à Paris». À la camaraderie de travail a succédé une franche et durable amitié. Cette qualité de pratiquer le comparatisme en psychiatrie ne s’est pas démentie, en particulier dans son travail à l’International. Il ne manquait pas de nous dire que nous n’étions pas le centre du Monde et qu’en d’autres lieux, nos principes d’universalité n’étaient pas également partagés, et lorsque ces principes l’étaient, les formes pratiquées pouvaient nous surprendre. Nous avons pu lui reprocher que cette idée de médecine centrée sur la personne – avant de l’être sur la science – était un objectif dépassé.

Il nous a utilement contredit et ouvert les yeux sur la nécessité d’un travail besogneux, ambitieux et sur le long terme pour contribuer à faire progresser l’esprit des Lumières, enrichies de ce qu’il est convenu d’appeler l’approche psychodynamique des pathologies mentales. C’est une conception anthropologique de l’humanité que nous partageons avec lui et qui continuera d’être soutenue. Il devient – par sa disparition prématurée, traumatisante pour tous, accidentelle – un personnage rangé dans la catégorie des ancêtres, ceux qui veillent sur les générations et auxquels les successeurs peuvent de référer, dont le nom est cité et la personne invoquée comme modèle de courage et d’engagement.

Merci Antoine.


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